Quelle décennie 2020-2029 pour l’Afrique ?


La trajectoire collective du continent Africain est devenue un sujet d’actualité et d’étude qu’il faut observer et analyser. Que sera la décennie 2020-2029 pour ce continent ?
L’on sait que la décennie 2010-2019 fut marquée par beaucoup d’évènements. Et ces évènements continueront à influencer l’évolution de ce continent pendant au moins 30 ans.
D’abord la décennie finissante est celle des cinquantenaires des indépendances Africaines. On sait qu’en 1960, 17 pays Africains furent déclarés indépendants. En 1960 c’est aussi l’année du massacre de Sharpeville en Afrique du Sud.

Mais de façon générale, l’année 1960 était qualifiée de l’année de l’Afrique et 50 ans après il fallait évaluer le parcours. On sait qu’en Afrique après des régimes éphémères normaux, ce furent des dictatures pour le service de l’Occident qui furent instaurées. Plusieurs coups d’Etat furent organises. Beaucoup des leaders progressistes furent assassinés.
Bref entre 1960 et 2009 l’Afrique a connu beaucoup des transitions. L’échec économique des années 80 avait précédé le vent de la démocratisation qui correspondait avec la fin de la guerre froide entre deux blocs de puissances caucasiennes. Etrangement l’Afrique était divisée dans cette lutte de positionnement entre ces deux blocs.
C’est dans cet élan de la démocratisation que l’année 2010 fut célébrée entre questionnements et bilans, entre espoirs et doutes.
En 2010 quelques évènements marquèrent la trajectoire collective de ce continent. Je parlerais de trois, à part les célébrations des cinquantenaires.
D’abord c’est le début du printemps Arabe. Ce printemps va commencer en Tunisie, pour aller en Egypte afin causer des dégâts en Libye et jusqu‘en Algérie en 2019.
Ce qui choque est qu’un seul pays fut envahi par les armées étrangères : Libye. On penserait que l’on était à l’époque des conquêtes du 19e siècle. Et sous cet angle, on imaginerait facilement que le printemps arabe fut orchestré dans les laboratoires d’Occident. C’est anormal que l’immolation d’un vendeur de rue de Tunis puisse provoquer la chute de Kadhafi et la division de tout un pays, l’esclavage moderne et le terrorisme au Sahel. Certains leaders Africains comme Kagame étaient les soutiens locaux de l’invasion de la Libye pourtant la Libye avait investi au Rwanda.
Le deuxième évènement concerne les élections en Côte d’Ivoire en 2010 et la crise conséquente. La ressemblance avec la Libye est que l’armée de la France était présente sur terrain pour arrêter un chef d’Etat et imposer un autre après des élections controversées. Une autre ressemblance est l’utilisation et l’instrumentalisation de la CPI par l’Occident contre deux leaders Africains bien identifiés. Les mandats d’arrêt furent lancés contre Gbagbo et Kadhafi pendant la « guerre ». Gbagbo finit par aller passer presque une décennie dans la geôle de la CPI. Kadhafi n’eut pas cette chance. Mais en 2019 Gbagbo fut relaxé.
Le troisième évènement mineur est l’organisation de la coupe du monde de football en Afrique du Sud. Il fallait un peu distraire le peuple avec un évènement sportif.
Les deux premiers évènements ont marqué l’Afrique pendant la décennie et continueront à le faire pendant cette prochaine décennie.
Pour la Libye, il y a les effets collatéraux en Libye puis en Afrique. La Libye comme Etat n’existe plus. L’un des Etats jadis les plus stables avec un niveau de vie supérieur n’existe plus. De la Libye il y a eu le Mali. Les forces engagées en Libye par l’OTAN sont allées créer le désordre au Mali d’abord puis au Sahel. Actuellement on parle du groupe G5 du Sahel. Il y a quelques jours d’ailleurs presque 70 militaires Nigériens furent massacrés dans une violence digne des films d’horreur. Entre temps la France a trouvé opportun d’envoyer ses militaires. Que cherche la France ? On voit clairement comment la France joue le rôle de pyromane et de sapeur-pompier. Jusqu’où ira le terrorisme en Afrique, ce terrorisme fabriqué par l’Occident ? En réalité toutes les puissances non Africaines se retrouvent dans ce schéma.
Le foisonnement des bases militaires sur le continent devient la conséquence logique. Même la Chine s’est empressée de construire la base sur le continent. Les pays comme la Turquie, le Qatar, l’Inde, la Russie sans oublier les Etats Unis se retrouvent. La Turquie veut aussi envoyer ses troupes en Libye pour sécuriser le pays. Les Etats-Unis redéployent ses pillons officiellement en Afrique centrale dont la RDC.

 Il ne manque que la confrontation (déjà prédictible) entre ces pays sur ce continent. On n’ignore pas jusqu’où la Chine et les Etats-Unis peuvent aller dans leur conflit stratégique.
L’Afrique va devenir un continent tampon pour les combats entre ces pays. Sachant que la jeunesse Africaine est ou sera la plus nombreuse sur le plan mondial, on peut suspecter tous les scenarios possibles.
Mais il est temps que l’Afrique (dont l’Union Africaine) s’implique activement. On ne peut continuer à vendre les Africains en pleine 21e siècle et l’Afrique reste aussi calme et tendre. Evidemment les organisations régionales n’aident pas toujours mais l’UA doit s’assumer.

Le deuxième évènement concerne l’avenir de la Francafrique et l’épineux problème de la monnaie FCFA. 14 pays Africains ont l’avenir de la France dans leurs mains. Si ces Etats s’émancipent, l’économie de la France va chuter. Ceux qui disent que « l’Afrique est notre avenir » se rendront compte que leur paradigme colonial dans une ère postcoloniale avait une mauvaise fondation.
Que sera la décennie 2020-2029 ? Il est fort possible que les conflits liées au terrorisme vont s’intensifier parce qu’ils favorisent la mainmise des puissances étrangères sur les ressources Africaines.
Déjà ce qui se passe au Sahel est désolant. Face à une France insolente, l’Afrique peut-elle prendre une posture commune ?
Il est possible que les conflits entre Etats puissent émerger. On sait actuellement en Afrique centrale, le Rwanda est en conflit avec le Burundi et l’Ouganda.
Le chaudron qu’est la RDC est ce terrain de combat pour ces 3 pays. L’alternance n’a pas produit des effets escomptés de stabilisation. Les tueries à Beni par les « rebelles d’ADF », les combats entre Burundi et Rwanda au Sud-Kivu sont des évidences que la RDC est loin de jouer son rôle de gâchette en Afrique centrale.
La position centrale de la RD Congo est clé pour comprendre que les Etats les plus stratégiques sont affaiblis pour que le continent reste vulnérable. La RDC et ses pays limitrophes constituent déjà 10 pays, soit 20% des Etats Africains en termes de nombre mais en termes d’espace c’est toute l’Afrique qui peut être affectée. Les croyants de la démocratie électorale n’arrivent plus à expliquer comment l’alternance ne résout pas le problème de la faiblesse des Etats. C’est sans oublier le soutien que l’Occident accorde à certains pays Africains pour déstabiliser leurs voisins. La liste des Etats faillis en Afrique risque de s’augmenter dans cette décennie. La Somalie et la Libye sont les exemples parfaits des Etats ultimement faillis. Et dans ces deux Etats on voit que leur déchéance est la conséquence de l’intervention militaire des puissances étrangères dont les Etats-Unis. Aucun Etat ne s’implique dans un conflit militaire sans savoir d’où viendra son effort de guerre, ni les bienfaits de la guerre. Il faudra que les Africains ouvrent l’œil et le bon et apprennent à anticiper. Il faut anticiper par l’éducation stratégique, éviter de faire une lecture euro-centrée, yankee-centrée, sino-centrée, franco-centrée, 
Chacune de ces perspectives visent des intérêts particuliers, contraires à ceux de ce continent. De façon explicite, le futur de l’Afrique se joue d’abord sur le plan intellectuel avant tout autre chose. Le départ des milliers d’Africains pour aller étudier est un danger de soft-power pour l’Afrique. En général, ces jeunes Africains partent étudier sans un plan de la part de leurs Etats respectifs. Ceci est différent de l’approche chinoise pour aller étudier en Occident. La première mission d’étude chinoise pour les Etats-Unis date de 1872. A l’époque la Chine est encore un empire et plus d’un siècle après la stratégie chinoise n’a pas changé. C’est l’une des raisons pour lesquelles les Etats-Unis ont récemment réduit la durée de visa d’études pour les étudiants chinois. L’Afrique ne peut pas jamais émerger sans ses jeunes. Il risque de se produire les mêmes effets que l’esclavage.
Le débat sur l’intégration Africaine reviendra avec force. La ZLEC pourra surement débuter si les gros poissons de l’économie Africaine laissent dissiper leurs inquiétudes. Ces pays, cependant, savent que la ZLEC peut affecter leurs industries respectives et leurs marchés intérieurs. Il n’y a pas de problème de bloquer la ZLEC si elle permet aux entités non continentales de tuer l’industrie Africaine. Chaque pays est protectionniste. Les Etats le deviennent de plus en plus, surtout en Occident. Les Etats-Unis l’ont démontré. La Chine ne maintient sa suprématie que par son protectionnisme fortement étatique. Les pays qui ont poussé le ZLEC semblent avoir été utilisés par certaines puissances non continentales. Entre temps la Chine devient agressive avec son initiative « la ceinture et la route » semblent très bien préparées pour la ZLEC.
L’intégration se passera aussi par l’existence du passeport de l’Union Africaine. Il sert a rien de donner ce passeport aux seules autorités politiques. Cette integration du sommet devient suspecte.
L’intégration c’est l’annulation du visa dans différents pays ou encore l’obtention du visa a l’arrivée. Cette initiative semble être la réponse de chaque Etat pour doper son industrie touristique.
D’ici 2029 il y aura des pays Africains qui vont émerger. Le Nigeria, s’il ne subit pas les effets des terroristes comme Boko Haram, pourra se démarquer. Le Maroc semble une puissance en devenir. Le Maroc a l’avantage que son leadership ne dépend pas des élections. Mais peut-être que le Maroc, la seule non victime du printemps arabe, pourra en être victime. Seulement si on ignore que le Maroc se prend pour un Etat occidental et très pro-Occidental. C’est le seul pays Africain qui continue à coloniser un autre Etat en Afrique.
Evidemment la démographie Africaine fait peur à l’Occident. L’Afrique doit bénéficier de son dividende démographique.
La situation de la population jeune nous parle de la suite du changement des régimes. Ceci a été vu dans les pays comme le Burkina Faso en 2014, au Soudan en 2019 ou dans les printemps arabe. Le changement de régime permet de passer pas seulement de la normalité mais aussi des anormalités comme les coups d’Etat. Par exemple l’on sait que l’Afrique a connu 16 coups d’Etat entre 2010 et 2019 contre 22 pour la décennie de 2000-2009, et entre 39 et 42 en moyenne sur la période 196-1999. Statistiquement, la décennie connaitra une dizaine des coups d’Etat ou plus. Connaitre ces Etats qui peuvent être victimes des coups d’Etat est important.
Aussi la décennie passée a vu le dernier des héros de l’indépendance être demis par un coup d’Etat. Robert Mugabe a fini sa présidence par un coup. On peut dire que la situation des partis de libération est caractéristique en Afrique Australe. Les anciens partis révolutionnaires sont au pouvoir en Afrique du Sud, Zimbabwe, Angola, etc. Est-ce qu’ils seront toujours au pouvoir dans la décennie prochaine ?
La même question est adressée à tous ces pays ou les présidents se maintiennent malgré l’âge. Déjà en 2019 un président Africain est mort en fonction surement à cause de l’âge.  Ce qui est sûr est qu’à l’horizon 2030, certains présidents risquent de ne plus être au pouvoir : Paul Biya, Alpha Conde, Peter Mutharika, Alassane Ouattara, Yoweri Museveni, etc. Leur départ permettra-t-il la stabilité ou l’instabilité du continent déjà fragile ? Tout dépendra de la préparation interne ou du concours des circonstances au moment du changement mais ce qui est sûr est que certains noms vont disparaitre a moins que la succession soit familiale, comme on peut le pressentir dans les pays comme le Gabon…
Dans tous les cas, l’Afrique doit demeurer un continent d’espoir mais pour cela il faut que la jeunesse comprenne les enjeux présents et futurs. Les prochains leaders ne doivent plus servir les pays qui aiment les ressources Africaines et non les Africains. Comme dit Kwame Nkrumah, « Africa must Unite » mais de façon positive et constructive. 

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