Afrique du Sud : Xénophobie, Afrophobie ou négrophobie ? Les causes profondes.


En analysant froidement ce qui se passe en Afrique du Sud, j’ai tendance à ne pas réagir émotionnellement. D’ailleurs la réaction de plusieurs compatriotes et d’autres Africains ne me surprend pas. Il faut creuser. 
La formule miraculeuse post-Apartheid vendue par les media était une illusion. Surtout que beaucoup d’Africains avaient cru naïvement que la démocratie électorale était la réponse à la problématique socio-économique  en Afrique du Sud. Tout le monde parlait en des termes élogieux. D’ailleurs Un prof Congolais  s’était permis de dire qu’il est difficile de décrire un des politiciens Sud-Africains « sans verser dans le panégyrique ». (Des mots lourds). 
Pourtant la situation décrite  par Steve Biko (à son époque dans les années 70) est toujours d’actualité aujourd’hui. A la page 75 de son livre phare « I write what I like » Biko observe qu’« il n'est pas nécessaire d'essayer d'établir la vérité sur l'affirmation selon laquelle les Noirs d'Afrique du Sud doivent lutter pour leur survie. Il se présente dans de nombreuses facettes de notre vie. La vie en banlieue noire à elle seule en fait un miracle pour quiconque veuille bien vivre jusqu’à l’âge adulte. Nous voyons là une situation de besoin absolu dans laquelle les Noirs tueront les Noirs pour pouvoir survivre. C’est la base du vandalisme, du meurtre, du viol et du pillage qui se poursuit alors que les véritables sources du mal - la société blanche - bronzent sur des plages exclusives ou se détendent dans leurs demeures de la bourgeoisie.»


 Je recommande ce livre aux Africains superficiels.
En passant nous sommes dans le mois de Biko assassiné le 12 Septembre 1977 à 31 ans. 
Quelques années après, il y a eu les accords CODESA que Moeletsi Mbeki a dit être à la base de l’échec de la transformation. Beaucoup de media ne parlent que CODESA public ou CODESA I. Il y avait aussi CODESA secret ou CODESA II.
La transformation était définie par l’oligarchie blanche en complicité avec les négociateurs noirs. Ainsi, la transformation était la somme de la démocratie parlementaire, la mondialisation et la discrimination positive (BEE). Mbeki dit à juste titre 
« L’Afrique du Sud, par conséquent, a une classe dominante, ce partenariat entre la classe politiquement dominante noire moyenne supérieure d'une part et de l'oligarchie économique blanche qui est propriétaire des MEC (Complexes Miniers et Energétiques) de l'autre. »
L’adoption des politiques néolibérales allait logiquement suivre.
Ainsi le parti politique jadis révolutionnaire, le plus ancien d’Afrique, est devenu aussi un des « Architectes de la pauvreté ».
En Septembre 2015  
Achille Mbembe avait été courageux de dire que « L’Afrique du Sud est la seule place dans le monde où il y avait ‘révolution’ et les oppresseurs n’ont rien perdu ».
La RSA est aussi le seul pays au monde où le FMI avait négocié avec l’opposition (1993). 
Au fait rien n’avait changé par rapport à la lutte de départ. 
Le pays était toujours inégalitaire et les inégalités sont croissantes. 
La violence décrite par Steve Bantu Biko est toujours présente et même croissante. 
Et c’est cette violence que les politiciens de l’ANC ont aussi orientée vers les étrangers (Africains noirs). Pour rappel depuis fin Aout 2019, le président Ramaphosa est sous pression d’accusation de corruption. Il avait reçu l’argent pour sa campagne dont principalement de donateurs blancs dont Nicky Oppenheimer. C’est chez les Oppenheimer que Mandela et Harry (le père de Nicky) se réunissaient régulièrement à partir de 1990.
Et l’autre Congolais qui disait qu’à Kolwezi il y a 9000 Sud-Africains qui y travaillent, j’avais envie de lui demander: « Les 9000 Sud-Africains sont-ils noirs ou blancs? ». La plupart sont blancs et travaillent souvent comme cadres supérieurs des MECs.
Ce pays-là mérite une thérapeutique spéciale.
Steve Biko est venu avec la formule que « Black is beautiful ». Les noirs doivent subir le traitement thérapeutique et psychologique. Voir des Africains noirs comme les ennemis en Septembre 2019 est un déni de l’héritage de Steve Biko. Ils n’ont pas toujours de terres 25 ans après l’instauration de la démocratie parlementaire de 1994. Mandela est mort, oubliant ce qu’il écrivait en 1956 au sujet de la Freedom Charter : " La charte frappe un coup fatal aux monopoles financiers et de l'or qui ont pendant des siècles pillé le pays et ses habitants condamnés à la servitude. La rupture et la démocratisation de ces monopoles vont ouvrir de nouveaux champs pour le développement d'une classe de la bourgeoisie non européenne prospère. Pour la première fois dans l'histoire de ce pays la bourgeoisie non-européenne aura la possibilité de posséder, en leur nom propre et en leur droit , les moulins et les usines , et le commerce et l'entreprise privée va florir et prospérer comme jamais auparavant ".

Ainsi  Faulkner a raison : « Le passé n’est jamais mort. Il n’est même pas passé »! 

Ce texte est issu d’un livre manuscrit écrit en 2015 comme réaction à un livre dédié à Nelson Mandela par Andre Mbata.

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