Quand est-ce que les blancs s’en iront ?
Emmanuel Lifenya avait écrit au journal Le
Stanleyvillois, dont les extraits furent repris par Présence
Congolaise le 27 Septembre 1958 avec des commentaires de Joseph Ngalula.
Quel était le message d’Emmanuel Lifenya?
Comment répondre à cette question 60 ans
plus tard?
Le Congolais part et laisse le Congo.
Lifenya aurait demandé: Quand est-ce que le Congolais commencera à rester dans
son pays?
Emmanuel Lifenya depuis Stanley écrivait
dans le journal en essayant de repondre à une question: « QUAND
EST-CE QUE LES BLANCS S’EN IRONT ? »
Cela peut choquer que moins de deux ans
avant l’indépendance, la question du départ des Belges était tabou. Evidemment,
en 1958, les débats de l’indépendance sont deja lancés d’abord par Kimbangu,
puis l’Abako puis Van Bilsen et etc.
Emmanuel Lifenya devait avoir entendu
parler de ce débat. Stanleyville était un centre important des évolués. Ainsi
son questionnement devient logique dans le sens où il ne réfléchit pas sur la
possibilité du départ mais sur la date, le mois, l’année de leur départ.
Selon Emmanuel Lifenya, « les noirs
ont une opinion: Le départ immédiat des Européens ». C’est l’opinion aussi
bien des « érudits ainsi que des derniers des imbéciles. »
Il évoque deux raisons: Être libre, se
faire paresseux, ne plus aller au travail (il n’y en aurait plus d’ailleurs),
boire la plus grande quantité de bière imaginable et enfin dormir tout
simplement.
Pour Lifenya, les noirs ne
possédaient aucune conscience professionnelle et toutes les elites noires
n’étaient que des bons parleurs frivoles incapables de toute bonne
oeuvre.
Les congolais qui se croient au sommet de
l’Everest juste avec quelques mots de Francais
La verve oratoire congolaise n’a pas
commencé aujourd’hui. A supposer qu’Emmanuel Lifenya est au fait un blanc, ce
que certains commentaires de Presence laissaient entendre, il s’agit donc
d’un malaise dès lors que les blancs auraient voulu des noirs soient et
demeurer simplement travailleurs et jamais parleurs.
S’il est un noir, il faut prendre la
critique au sérieux. Cela rappèlerait surement tous ces projets annoncés avec
phare mais qui n’ont jamais aboutis. Et généralement les evaluations posent
problèmes parce que la propagande pour accompagner des faux projets est
toujours surdimensionnée.
Depuis 1960, on peut lister plus d’une
centaine de ce genre des projets.
Est ce pour autant que “l’esprit nous
manque encore” comme dit Lifenya?
Non car à chaque période de l’histoire il y
a toujours eu la voix de la raison, celle qui peut nager à contre courant de
l’opinion majoritaire ou de la majorité ou minorité violente.
Par exemple, lors de l’indépendance,
un acharnement contre Lumumba n’etait pas passé inaperçu. Les classes dominantes
s’etaient liguées contre Lumumba mais Lumumba avait quand même des soutiens
internes. Mulele illustre mieux cette voix qui parlera classe en 1960-68.
Pourquoi Mobutu qui pardonnait aux anciens rebelles et opposants comme Nguz
avait assassiné Mulele sans réfléchir? Pendant que Mobutu cooptait les
intellectuels au comité central du MPR pour qu’ils chantent et dansent, Mudimbe
VY et d’autres avaient refusé de faire partie de la comédie centrale. Nous
manquait-il l’esprit? Non. Nous manque-t-il lorsque le reste existe
encore?
L’on sait aussi qu’en 1958 les Belges ne
sont prêts par à partir. Les événements spectaculaires d’abord de Decembre 1958
avec Lumumba et ceux de Janvier 1959 vont venir influencer le cours de
l’histoire.
Lifenya pense que si nous parvenons à faire
partir les Belges, ce sera une trahison, « un poignard dans le dos ».
Et d’ailleurs selon lui, « d’autres nations viendront nous
exploiter ».
Les mêmes pays, en réalité, ont toujours
exploité même lorsque les Belges étaient là.
Ainsi, dans la logique de Lifenya, «
la traite des esclaves va recommencer ».
Peut-on dire alors que depuis 1960 nous
vivons une traite des esclaves? Le peuple congolais a lutté pour sa survie. Il
a lutté à sa façon parce que la vie est un combat. D’ailleurs selon Lifenya,
les Belges ne perdraient rien en partant parce qu’ils souffraient déjà au
Congo. Le pillage des ressources les faisaient souffrir. On peut ainsi dire que
les Belges etaient des masochistes si l’on pense comme Lifenya. Heureusement
que l’histoire a prouvé que les Belges etaient heureux au Congo à cause de ce
qu’ils y pillaient. Avant l’independance ils voulaient que le roi des Belges
reste chef d’Etat de la Republique du Congo. Heureusement que les
Congolais avaient refusee cette proposition.
A peine l’indépendance, la Belgique avait
envahi le Congo militairement, provoqué la sécession du Katanga en utilisant
leur marionnette Tshombe. Ils avaient des éléments dans notre armée, dans nos
universités, dans l’administration, partout et ça apres l’indépendance. Ils ont
aidé Mobutu à faire son coup d’Etat. Ils ont soutenu Joseph Kabila en 2006 et
cherchent encore à soutenir d’autres pantins.
Pendant ce temps certains compatriotes
congolais ont décidé d’aller vivre Belgique parce que chez eux il n’y a pas de
vie.
Quand est-ce les blancs s’en iront? En
fait, ils partiront le jour où les congolais se décoloniseront mentalement. Que
dire lorsque la CTB équipe encore nos école parce que certains leaders
détournent les biens publics. Et récemment d’ailleurs on a eu un premier
ministre au Congo qui était Belge!
La question aurait dû être: est ce que les
Blancs partiront? C’est notre devoir de les chasser dans leur petite monarchie
s’ils continuent à rester au Congo! C’est notre devoir de nous
décoloniser mentalement!
Chongqing,
13 Octobre 2018
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