Le Transfert de Technologie: Du succès de la Chine au Vrai Défi du Développement de la RD Congo
Le Transfert de Technologie: Du succès de la Chine au Vrai Défi du Développement de la RD Congo
Différents rapports économiques récents montrent que l’Afrique est en train d’afficher des chiffres de croissance encourageants. Ces chiffres flattent les chercheurs et penseurs qui analysent la croissance sans circonscrire leur étude dans la perspective du développement. Il est possible d’avoir la croissance économique mais sans développement aucun. La plupart de pays Africains n’ont jamais décidé de leur développement à long terme et la RD Congo ne déroge pas à la règle.
Si le développement doit être le but, l’un des moyens et pas de moindres pour y parvenir constitue la technologie. Face à la concurrence et la compétition internationales sur un marché de plus en plus global et pour améliorer la qualité de vie des populations, chaque pays doit aspirer aux améliorations technologiques. La globalisation aurait dû être le cadre de l’échange des technologies ou mieux du transfert de transfert de technologie. Sur cet aspect, la globalisation a été une illusion pour les pays non, sous, moins développés. N’est-ce pas logique qu’il doit exister un préalable d’écart technologique pour qu’il y ait transfert de technologie ?
Le transfert de technologie est un processus d’acquisition d’une ou des technologies qui constituent l’étude des techniques et des outils et même des arts. Il comporte l’apprentissage et la maitrise pratiques des technologies. Il peut aussi constituer un acte stratégique pour développer une autre trajectoire technologique. Il est la résultante des décisions volontaires d’une organisation qui aspire au développement.
L’apprentissage peut être individuel ou collectif et permanent de peur de perdre tous les acquis pratiques mais la maitrise d’une technologie doit collective. Le transfert de technologie est alors avant tout un fait de communication humaine quoique comportant d’importantes dimensions techniques.
Il n’est pas fonction de cas isolés d’apprentissage où quelques individus sans aucune vision du développement de leur société reçoivent une formation technique. Dans cette perspective, le phénomène de la fuite des cerveaux est à déplorer. Le manque de cette vision de développement a favorisé la création de l’Afropessimisme pour bien des jeunes Africains pour qui le chemin de l’Occident est le synonyme du bonheur parfait car se disent-ils, l’Afrique ne changera pas.
En général, le transfert de technologie peut se réaliser entre
● différentes nations, de développement égal ou inégal,
● entre entreprises de taille égale ou différente, entre entreprises d’un même pays ou non,
● au sein des filiales d’une même firme.
Le premier contexte intéresse ceux comme moi qui pensent au développement durable de l’Afrique en général et celui de la RD Congo en particulier.
Tout observateur de qualité remarquera qu’en Afrique, en RD Congo la connaissance est souvent théorique et que les domaines pratiques de l’apprentissage et du développement sont encore l’apanage de colonisateur d’hier. Apparemment ce n’est plus étonnant qu’il y ait encore carence des techniciens, ingénieurs et que pour faire le troisième cycle des études de sciences appliquées et des technologies le congolais prendre le chemin de l’Occident plus de 50 ans après l’indépendance. Les écoles techniques font défaut et les laboratoires dans les écoles exceptionnelles de techniques laissent à désirer. La science comme connaissance s’apprend dans les écoles et les universités mais où s’apprend la technologie ?
Il y a plus de 60 ans, la Chine commençait sa révolution culturelle et aujourd’hui tout le monde parle de l’empire du milieu. D’ici 2030, la Chine deviendra la première puissance économique mais comment expliquer leur succès qui est aussi technologique quand on considère son industrie manufacturière ? En analysant un document au Senat Américain sur les efforts de la Chine de transférer la technologie des Etats Unis et autres pays développés vers la Chine et les entreprises chinoises, j’ai conclu que l’ascension de la Chine n’est le fruit du hasard mais d’une vision de développement qui se matérialise à coups sûrs. La Chine est entrain de forcer le transfert de technologies parce que le transfert ne sera jamais un cadeau des pays développés et parce que le vrai transfert est le vrai frein contre tout asservissement.
Dans le passé, la Chine obligeait toute entreprise étrangère qui voulait entrer dans le marché chinois à transférer sa technologie. Présentement, les obligations ne sont plus explicites mais plutôt implicites. Le gouvernement chinois favorise le transfert de technologie par l’accès au marché chinois, par l’accès aux contrats gouvernementaux et par le bénéfice des subsides et autres avantages.
L’ACCES AU MARCHE CHINOIS
Dans le secteur de la transformation et de l’industrie, Le gouvernement force les entreprises étrangères qui veulent entrer dans le marché chinois à former de joint-ventures avec les entreprises chinoises.
Les partenaires chinois obligent souvent le transfert de technologie comme condition de formation de ces joint-ventures. En plus de cela, le gouvernement chinois doit approuver la formation de ces joint-ventures.
Puis que les marchés américain et européen sont déjà saturés, la Chine offre un cadre de croissance rapide pour les entreprises étrangères soucieuses de s’étendre et la société chinoise doit consommer, les entreprises étrangères ne peuvent que transférer la technologie à leurs partenaires chinois.
« Si les Chinois vivaient comme les Américains, on aurait besoin de 3 planètes. », a observé un chercheur après des minutieuses études sur le potentiel de la Chine.
La crise financière de 2008 a favorisé la force de la Chine. Les chinois ont compris que le monde a besoin d’eux plus qu’ils n’ont besoin du monde.
Les secteurs chinois de l’automobile (par exemple Cherry), l’aéronautique (Le programme C919 qui va concurrencer l’Airbus A320), de la transformation ont grandement bénéficié de ces genres de coopération. Par rapport à l’aéronautique, l’aviation militaire chinoise pourrait profiter de ces genres de programmes, d’où la peur des Etats Unis. Doit-on ici démontrer que la Chine est une puissance spatiale ?
L’ACCES AUX CONTRATS GOUVERNEMENTAUX
Pour avoir les contrats gouvernementaux en ce qui concerne les biens et les services qui peuvent s’élever à 100 milliards de dollars comme en 2009, le gouvernement chinois a favorisé que les entreprises puissent s’inscrire dans le cadre de « Produits indigènes d’innovation ». Avec ce cadre, les produits sont enregistrés en Chine et leurs propriétés intellectuelles et licences.
Ainsi les Patents et les Copyrights doivent être enregistrés en Chine pour avoir un traitement de choix dans la passation de marché.
Ainsi la Chine est devenue la première puissance mondiale en ce qui concerne les propriétés intellectuelles. N’a-t-elle pas de facto acquis la technologie ?
SUBSIDES ET AUTRES AVANTAGES FISCAUX
D’abord il y a une réduction de taxes de 150% pour les entreprises étrangères qui ont leurs sections de Recherche et Développement en Chine. Quoique les entreprises étrangères payent le même taux de 25% de taxe sur les revenus que les entreprises chinoises, elles paient moins si le transfert de technologie est garanti.
Pour la première année de transfert de technologie de transfert de technologie, les 5 premiers milliards de RMB de profits ne sont sujets à aucune taxation. Au de la de ce montant, la taxation sera de 12.5% au lieu de 25% normaux.
Pour les technologies de pointes et les nouvelles technologies, un taux préférentiel de 15% est appliqué. Et ces technologies doivent avoir le soutien de l’Etat Chinois et doivent être la propriété exclusive de ces entreprises étrangères.
Il y a d’autres législations qui favorisent le transfert de technologie mais arrêtons-nous sur ces évidences.
Rentrant en Afrique et en RD Congo, nous remarquons que les jalons du développement durable n’ont jamais été posés, le reste n’étant que des déclarations d’intention pour distraire les âmes faciles et les intellectuellement naïfs.
La plupart de pays Africains ont connu les mêmes de problèmes à des différences près. Les indépendances en séries ou mieux en parallèle ont été déclarées il y a une cinquante d’années. Suivra la période des partis uniques et des dictatures des années 60 jusqu’à la fin de la guerre froide et des transitions après les années post perestroïka.
La technologie de développement ne s’est pas encore transférée en Afrique et mieux encore le taux de transfert est trop bas. Les pays Africains n’ont jamais eu à décider de leurs développements.
On les force à s’endetter pour tourner en rond et non pour se développer. Le taux d’industrialisation en Afrique (Subsaharienne) est plus faible par rapport à tous les autres continents.
Entre 1965 et 1990, la dette publique extérieure du Congo est caractérisée par une croissance exponentielle passant de 32 à 10 274 millions de dollars. Elle est de 1040 millions de dollars en 1973. Pour construire ses éléphants blancs, le Congo-Zaïre doit s’endetter
Avec la chute des cours du Cuivre en 1974, le pays doit s’endetter pour payer sa dette.
Entre 1983 et 1990, il y a une forte intervention des institutions financières internationales, le FMI et la Banque mondiale, qui mettent en place leurs politiques néo-libérales (austérité).
En 1987, le FMI impose au Zaïre un programme d’ajustement structurel qui exige le remboursement avant tout et la désétatisation. En effet, les secteurs sociaux, l'agriculture, la fonction publique sont toujours délaissés dans le budget public au profit des remboursements de la dette et de la volonté des créanciers. La subvention sur les produits de première nécessité doit cesser et la TVA doit augmenter.
Les éléphants blancs sont des projets industriels massifs qui n’ont jamais été rentables mais qui ont constitué les sources de détournements de fonds par le clan Mobutu. Ces éléphants n’ont fait qu’accroitre le stock de la dette publique extérieure du Zaïre. Ces projets ont été accomplis dans les domaines de l’Energie, du transport et de communications.
Les éléphants Blancs du ZAIRE
L'expansion de la Gécamines, la sidérurgie de Maluku, la "Voix du Zaïre", le pont de Matadi, la cimenterie nationale, le complexe agro-industriel de N'Sele, l'aéroport international de Kisangani, le barrage de Mobaye, la COMINGEM, le centre de commerce international du Zaïre.
La "Voix du Zaïre" et les stations de télécommunication illustrent un Eléphant blanc. Il s'agissait alors de réaliser un système de réseau hertzien de radiotélévision partout dans le pays. Or cet ensemble est marqué par une forte disproportion entre les mises de fonds, les innovations technologiques et le résultat final.
La réalisation de ce projet fut confiée à Thomson CSF qui l'utilisa pour expérimenter la technologie de pointe avant de la mettre en place en Europe et greva lourdement le budget de fonctionnement par des frais de maintenance très élevés.
Plusieurs études démontrent l’existence d’une corrélation directe entre le gonflement de la fortune du clan Mobutu et le gonflement de la dette extérieure.
En 1970, la part réservée aux dépenses présidentielles représentait 21,3% du budget total de l’Etat soit 160 millions de dollars
Entre 1990 et 2000, la dette congolaise s’est accrue sans nouvel emprunt. La croissance est due à l’accumulation des intérêts des prêts et au 31 Décembre 2000, la dette est déjà à 12.135 milliards de dollars.
Après 1998 suivra la période de guerres d’exploitation, de contrats léonins où les ressources minières de la RD Congo furent pillées et bradées à vil prix sans aucune perspective de transfert de technologie.
A partir de 2002, la reprise des paiements de la dette, impayée depuis 1993, ouvrira la porte à une restructuration de dette qui doit permettre au pays d'obtenir des financements extérieurs pour sa reconstruction et de participer à l'initiative en faveur des pays pauvres très endettés (PPTE). L'objectif non avoué de cette restructuration de dette est la conversion d'anciennes dettes odieuses et impayables en de nouvelles dettes qui ne pourraient en principe pas être taxées d'odieuses. Cette opération a donc été une véritable opération de blanchiment.
La Banque Mondiale rentre au Congo en 2002 et a beaucoup influé sur la signature et l’adoption de Code Minier entré en vigueur en 2002. Ce code minier ne favorisait aucunement le transfert de technologie mais seulement le vol des ressources. Quelle technologie pouvait se transférer dans de telles conditions ?
Après, il y a eu les contrats sino-léonins que les institutions de Bretton Wood ont combattu pour manque de transparence. Aucun transfert de technologie n’était garanti avec ces contrats.
Actuellement, nous sommes dans l’ère de la révolution de la modernité mais cette modernité est-elle technologique?
Là où les pays comme la Chine ont excellé, d’autres pays comme la RD Congo semblent être dans un circuit de désespoir sans lendemains meilleurs. La technologie et son transfert doivent être considérés si la RD Congo veut un jour entrer dans le concert des nations et avoir la place que le maréchal évoquait dans le fameux Objectifs 80. Autrement, nous sommes dans le 2è cinquantenaire de l’illusion.
Philippe Faradja
Echanges à l'Espace Etudiant du Centre de recherche et de documentation Africaine (CERDAF)
Bukavu, Juillet 2013
Philippe Faradja
Echanges à l'Espace Etudiant du Centre de recherche et de documentation Africaine (CERDAF)
Bukavu, Juillet 2013
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